Ces derniers temps, la période est faste pour la construction de logements. Depuis l’automne les chantiers commencés en Corse se sont envolés, pour atteindre près de 6 000 nouveaux logements sur les 3 derniers trimestres. Un tel niveau de construction n’avait jamais été observé dans l’île, même durant les années 2006 et 2007, pourtant déjà très fastes (cf. graphique).
Cette activité est principalement portée par une mise en construction très dynamique de la part des promoteurs, qui lancent des logements collectifs sur un rythme endiablé. De plus, compte tenu du niveau toujours très élevé de permis de construire délivré sur le territoire, on peut s’attendre à voir cette flambée perdurer à court terme.
Pour autant, sur le strict plan de l’analyse économique, faut-il se réjouir d’une telle frénésie ? En fait, derrière la croissance actuelle dans les secteurs de la construction et de la promotion immobilière, un risque majeur émerge.
L’économie corse, on l’a souvent dit dans ces colonnes, est très dépendante de l’investissement dans la pierre. 18 % des salariés du secteur privé travaillent dans ce secteur – le double de la moyenne française – et il s’agit de très loin du plus gros créateur d’emploi depuis 2000, avec près du tiers des nouveaux postes. Cette croissance a eu un effet d’entraînement sur le reste de l’économie, largement supérieur à celui de la fréquentation touristique.
Or, au risque de paraître insistant et un peu redondant, on peut douter du caractère durable de cette croissance. En effet, la demande pour du logement neuf pourrait bien ne pas être suffisante pour absorber une telle production.
La promotion immobilière – au cœur des performances des derniers mois – va subir en 2013 les effets de la fin du dispositif de défiscalisation Scellier qui permettait de soutenir fortement les achats de logements neufs. Afin d’anticiper sur cette fin, il faut lancer le maximum de logements. Il s’agit d’un mouvement très similaire à ce qu’a connu l’automobile en France avec la prime à la casse. Cette prime a temporairement soutenue les ventes mais a, en même temps, assécher le marché pour plusieurs années. Ce risque est non négligeable en Corse car les logements collectifs (principalement construits par les promoteurs) représentent 52 % des mises en chantiers.
A la fin du Scellier se rajoute celle du prêt à taux zéro « plus » (PTZ+) pour les logements anciens et à sa réduction dans le neuf. En 2011, le PTZ+ a injecté 13 millions d’euros pour les logements anciens et 31 millions d’euros pour les logements neufs. On peut estimer que les opérations dans le neuf impliquant un PTZ+ pèsent autour de 20 % du marché.
La diminution des avantages ne sera pas sans conséquence sur la demande de logements. Sans compter que l’immobilier est en première ligne pour subir de nouveaux prélèvements fiscaux (patrimoine non délocalisable donc facilement taxable).
Plus largement, on peut ajouter que le contexte économique n’est pas franchement favorable à la fois à l’achat immobilier, en résidences principales mais surtout en résidences secondaires (44 % du marché de la construction neuve).
Pour l’instant, le repli de la demande touche surtout l’ancien, où les transactions immobilières ont chuté de moitié entre le premier et le deuxième trimestre de 2012. Toutefois, les stocks des promoteurs ont atteint au début de l’année un nouveau record et représentent désormais près de 9 mois de ventes.
En somme, comme pour les banques dont la chute entraînerait l’ensemble de l’économie, la construction est un secteur systémique en Corse. « Too big to fail », trop gros pour faire faillite, comme disent les anglo-saxons. Il faut donc se poser sérieusement la question de la gestion d’une probable crise immobilière.
Cette gestion ne pourra passer par une fuite en avant, alimentant encore un peu plus une dérive qui a conduit à construire en Corse 3 fois plus de logements par habitant qu’au niveau national. Mais afin d’amortir les conséquences sociales du dégonflement du secteur, il ne faudra pas hésiter à injecter de l’argent public. Le problème étant que cette ressource est de plus en plus rare.
Article publié dans le magazine Corsica en août 2012.
Cette activité est principalement portée par une mise en construction très dynamique de la part des promoteurs, qui lancent des logements collectifs sur un rythme endiablé. De plus, compte tenu du niveau toujours très élevé de permis de construire délivré sur le territoire, on peut s’attendre à voir cette flambée perdurer à court terme.
Pour autant, sur le strict plan de l’analyse économique, faut-il se réjouir d’une telle frénésie ? En fait, derrière la croissance actuelle dans les secteurs de la construction et de la promotion immobilière, un risque majeur émerge.
L’économie corse, on l’a souvent dit dans ces colonnes, est très dépendante de l’investissement dans la pierre. 18 % des salariés du secteur privé travaillent dans ce secteur – le double de la moyenne française – et il s’agit de très loin du plus gros créateur d’emploi depuis 2000, avec près du tiers des nouveaux postes. Cette croissance a eu un effet d’entraînement sur le reste de l’économie, largement supérieur à celui de la fréquentation touristique.
Or, au risque de paraître insistant et un peu redondant, on peut douter du caractère durable de cette croissance. En effet, la demande pour du logement neuf pourrait bien ne pas être suffisante pour absorber une telle production.
La promotion immobilière – au cœur des performances des derniers mois – va subir en 2013 les effets de la fin du dispositif de défiscalisation Scellier qui permettait de soutenir fortement les achats de logements neufs. Afin d’anticiper sur cette fin, il faut lancer le maximum de logements. Il s’agit d’un mouvement très similaire à ce qu’a connu l’automobile en France avec la prime à la casse. Cette prime a temporairement soutenue les ventes mais a, en même temps, assécher le marché pour plusieurs années. Ce risque est non négligeable en Corse car les logements collectifs (principalement construits par les promoteurs) représentent 52 % des mises en chantiers.
A la fin du Scellier se rajoute celle du prêt à taux zéro « plus » (PTZ+) pour les logements anciens et à sa réduction dans le neuf. En 2011, le PTZ+ a injecté 13 millions d’euros pour les logements anciens et 31 millions d’euros pour les logements neufs. On peut estimer que les opérations dans le neuf impliquant un PTZ+ pèsent autour de 20 % du marché.
La diminution des avantages ne sera pas sans conséquence sur la demande de logements. Sans compter que l’immobilier est en première ligne pour subir de nouveaux prélèvements fiscaux (patrimoine non délocalisable donc facilement taxable).
Plus largement, on peut ajouter que le contexte économique n’est pas franchement favorable à la fois à l’achat immobilier, en résidences principales mais surtout en résidences secondaires (44 % du marché de la construction neuve).
Pour l’instant, le repli de la demande touche surtout l’ancien, où les transactions immobilières ont chuté de moitié entre le premier et le deuxième trimestre de 2012. Toutefois, les stocks des promoteurs ont atteint au début de l’année un nouveau record et représentent désormais près de 9 mois de ventes.
En somme, comme pour les banques dont la chute entraînerait l’ensemble de l’économie, la construction est un secteur systémique en Corse. « Too big to fail », trop gros pour faire faillite, comme disent les anglo-saxons. Il faut donc se poser sérieusement la question de la gestion d’une probable crise immobilière.
Cette gestion ne pourra passer par une fuite en avant, alimentant encore un peu plus une dérive qui a conduit à construire en Corse 3 fois plus de logements par habitant qu’au niveau national. Mais afin d’amortir les conséquences sociales du dégonflement du secteur, il ne faudra pas hésiter à injecter de l’argent public. Le problème étant que cette ressource est de plus en plus rare.
Article publié dans le magazine Corsica en août 2012.