Crédits et tourisme, les deux piliers de la résistance de l’économie corse en 2009




Une économie qui a continué à croître en 2009

L’économie s’est relativement bien comportée dans la crise actuelle. En effet, bien que l’île n’ait pas échappé aux répercussions de la Grande récession ainsi que le montrent les chiffres du chômage, elle n’a pas connu une dégradation trop importante de son activité.

En effet, l’élément le plus frappant est la très bonne résistance du crédit distribué par les banques. C’est là un des éléments qui nous a le plus surpris en 2009. Avec des hausses toujours soutenues, à la fois pour le crédit immobilier et pour le crédit investissement, toujours proche de +10 % sur un an au mois de septembre 2009, on est très loin de la situation prévalant au niveau européen ou même national. Ainsi, les ménages et les entreprises sont restés demandeurs de financement et les banques n’ont pas été excessivement frileuses.

Ceci a eu un impact non négligeable sur l’emploi. En effet, si l’activité immobilière en Corse connaît bien une évolution négative depuis plus d’un an, la résistance de la demande illustrée par les flux de crédits logements a participé à limiter l’ampleur de la crise pour la construction neuve dans l’île. Ainsi, l’emploi dans ce secteur ne s’est pas ajusté fortement à la baisse. Or, 16 % de l’emploi salarié privé se trouve lié à la construction. A la demande privé, il faut aussi rajouter la commande de bâtiments et travaux publics, qui a représenté près de 110 M€ de commandes sur les trois premiers trimestres de cette année.

De plus, comme le montrent les crédits investissements, les entreprises n’ont pas significativement coupé dans leurs projets de développement. Or, ceci n’était vraiment pas gagné d’avance. En effet, comme le montrent les enquêtes banque de France depuis plusieurs mois, pour les chef d’entreprises l’avenir est teinté d’incertitudes. Et l’incertitude n’est pas l’amie de l’investissement.


la réussite de la saison touristique en Corse a participé à limiter la casse

Le tourisme a été le deuxième pilier de la croissance en 2009. Très loin de la crise connue par d’autres destinations méditerranéennes (chute souvent proche de 10 % de la fréquentation), les résultats de la haute saison ont été très positifs pour l’île en termes de fréquentation. Même si les données sur les retombées économiques de l’activité touristique sont inexistantes, le bilan peut être présumé globalement bon. Ceci se retrouve d’ailleurs dans les statistiques sur l’emploi salarié par secteurs, avec un secteur touristique résistant plutôt bien, tandis que les autres filières sont globalement orientées à la baisse.

Toutefois, la faiblesse de l’économie va être amenée à durer…

Néanmoins, cette bonne position relative ne doit pas conduire à penser que tout va pour le mieux. En effet, la situation de l’économie corse reste très fragile et cette fragilité pourrait même venir à augmenter dans le temps. Le point central des problèmes est le marché du travail, qui reste très dégradé. La tendance pour l’emploi salarié est à la diminution des créations d’emplois. Le rythme pourrait passer sous les 2 % sur un an pour l’emploi salarié privé. Or, ceci est très largement insuffisant pour limiter la hausse du chômage dans l’île. Dans le même temps, les défaillances d’entreprises – bien que en-dessous de nos attentes – restent élevées.

… et la Corse risque de connaître une stagnation plus longue qu’ailleurs

Or, avec moins d’emplois, un chômage en hausse et une progression des salaires faible (liée à la fois au SMIC et à l’excès de main d’œuvre inemployée), les revenus de la population et donc la consommation seront atones. Ceci va peser durablement sur l’économie corse, qui est très dépendante de la consommation des ménages.

Enfin, il y un certain nombre d’éléments plus « de fond » qui vont venir se rajouter. Le plus déterminant est l’évolution du secteur public. Le poids économique du secteur public dans l’île – 40 % des rémunérations distribuées dans l’île et environ 6 % du PIB dépensé chaque année en investissements – est un atout dans la crise actuelle. Or, il sera difficile de maintenir à la fois le niveau d’intervention public dans l’économie (investissements et subventions) et l’emploi public à l’avenir. Les pressions sur les finances publiques nationales et locales sont très fortes. Au final, la baisse ou la faible hausse des divers transferts publics (principalement salaires, prestations sociales et dotations) est en train de s’enclencher. De force, l’importance du secteur public devient faiblesse.

Lundi 7 Décembre 2009
Guillaume Guidoni