L’inexorable hausse de la pauvreté en Corse


La Corse confirme sa situation très mauvaise du côté de la pauvreté. Les jeunes, les plus âgés et les familles monoparentales continuent de souffrir le plus. Une situation de la croissance de ces dernières années n'a pas modifié.



Les données pour 2007 montrent que la pauvreté continue à progresser dans l’île

La publication des données pour 2007 – dernières données disponibles car basées sur les déclarations d’impôts de 2008 – montrent une forte hausse de la pauvreté en Corse cette année là. Le taux (dit taux à 60 %, qui est généralement pris pour référence) passe en effet de 19,3 % des ménages de l’île à 20,4 %. Cette statistique est alarmante car d’une part la Corse détient le record national et, d’autre part, la progression (cf. graphique ci-dessous) y est la plus marquée. Pour mémoire en 2004, le taux était estimé à 17,7 % (attention toutefois, un changement de méthodologie est intervenu en 2005).

En effet, au niveau national, le taux est de 13,4 % et la deuxième région la plus touchée par la pauvreté (Languedoc-Roussillon) est à 18,7 %. De plus, avec une hausse de 1,1 point de son taux de pauvreté entre 2006 et 2007, l’île dépasse largement la hausse observée en France (+0,2 point de %) et aucune région ne connaît une telle ampleur.

Une hausse massive chez les plus âgés

La hausse a été surtout concentrée et massive sur les publics âgés. En effet, pour les plus de 60 ans, la hausse est massive, +6,3 points de % entre 2006 et 2007, soit un taux désormais à 19,3 %. En revanche, pour les moins de 20, le taux de pauvreté a légèrement baissé, à 26,1 % -1,3 point de %) des individus. Les taux précédents sont largement au-dessus de la moyenne nationale, avec respectivement 9,3 % pour les plus de 65 ans et 19,1 % pour les moins de 20 ans. Pour les autres catégories, les taux restent quasi-stables mais là encore largement au-dessus des moyennes nationales (exemple tranche 30-64 ans 18,8 % contre 11,8 %).

Au niveau du type de ménages, les familles monoparentales restent en « tête » de la pauvreté, avec 31,9 % des ménages touchés. Pour ces catégories, l’écart avec la moyenne nationale (29,9 %) est faible.

En conclusion, la forte hausse de la pauvreté est principalement imputable à une nette dégradation de la situation pour les ménages retraités. La pauvreté en Corse touche principalement les plus jeunes et les plus anciens. De plus, la situation des familles monoparentales, dont près du tiers vit sous le seuil de pauvreté, est critique.

Malgré la hausse du revenu disponible, la pauvreté ne recule pas

Nous avions récemment souligné que le revenu disponible progressait dans l’île, or la pauvreté augmente. En fait, il ne faut oublier trois données dans cette équation. Premièrement, le niveau important d’inégalités au sein de la société corse. Deuxièmement, la croissance de la population, c'est-à-dire que le gâteau doit grossir vite car il est partagé entre plus de personnes. Troisièmement, la croissance est stimulée par les revenus d’activité et les hausses de prestations sociales. Toutefois, les retraites par tête ne suivent pas la hausse des autres revenus et les plus âgés s’appauvrissent.

Le modèle économique corse est incapable de réduire la pauvreté

Encore une fois, le modèle économique et social de l’île ne permet de pas de réduire la pauvreté. Les plus fragiles, à savoir les familles monoparentales, les jeunes et les vieux ne sont plus aussi soutenus par la famille élargie que par le passé. Le sujet avait déjà été abordé sur ce site.

D’autre part, le niveau élevé de pauvreté des 30-64 ans constitue selon nous un indicateur très alarmant de l’état de la société corse. Près de 19 % des individus connaissent une situation de pauvreté. Certes, l’économie souterraine permet de compenser une partie de ce phénomène. Mais, il ne faut pas oublier que les salaires « au noir » sont rarement des salaires élevés. De plus, sans cotisation, pas de retraite, donc une pauvreté accrue à l’avenir.


Et depuis 2007 ?

Sans faire de projection, la dégradation progressive de la situation sur le marché du travail depuis 2008 a vraisemblablement conduit à faire progresser la pauvreté dans la tranche 30-64 ans. De plus, pour les publics fragiles, il n’y a pas eu de mouvement susceptible de modifier la situation de 2007. Au final, il paraît probable que 2008 et 2009 ait encore été des années de hausse de la pauvreté.

Vendredi 26 Mars 2010
Guillaume Guidoni