À la suite de l’article publié sur l’Islande, continuons l’exploration de cette petite économie insulaire.
Les statistiques citées ici sont issues des bases de données de l’OCDE.
Avant de rentrer en crise dès 2006, en septembre 2008 sous sa forme la plus aigüe, l’Islande a derrière elle un passé glorieux. En effet, en 1970, le produit intérieur brut en volume par habitant islandais et en parité de pouvoir d’achat* était inférieur de 48 % à la moyenne de l’OCDE (pays dits « développés ») et proche de celui de la France (5 % en dessous pour être précis). En 2005, l’Islande dépassait la moyenne de l’OCDE de 39 %... et la France de 27 % !
En clair, cela veut dire que sur 30 ans l’économie islandaise a cru nettement plus rapidement que la plupart des autres pays développés et que ces habitants se sont fortement enrichis. Ce petit pays a d’ailleurs laissé la France loin derrière.
Il serait vain de préciser l’ensemble des éléments qui ont accompagné le rattrapage puis le dépassement de la moyenne de l’OCDE en termes de niveau de vie. Il faudrait pour cela écrire un livre. Toutefois, quelques éléments structurants donnent, je pense, les grandes lignes du chemin emprunté.
Premièrement, pour faire plaisir aux démographes, il n’est de richesse que d’Homme. Un élément de fond, présent de 1970 à aujourd’hui est le dynamisme de la démographie islandaise. La population est en croissance forte, autour de +1,1 % par an en moyenne entre 1970 et 2007 (+0,5 % en France). On note juste un léger tassement au début des années 90. Cette croissance est principalement alimentée par la natalité la plus forte des pays européens. En effet, contrairement à ce qui est souvent dit, la France ne détient pas le record de la fécondité, le vrai détenteur étant L’Islande avec 2,07 enfants par femme en âge de procréer en 2006 (stable autour de ce chiffre depuis le début des années 90), légèrement devant la France (1,98). Depuis de début des années 2000, on a observé une immigration plus importante du fait des besoins en main d’œuvre générés par la situation de plein emploi. De façon très classique, démographie dynamique = croissance dynamique.
Toutefois, la démographie seule ne peut expliquer l’écart de performance avec la France. Une observation plus attentive des taux de croissance montre en fait deux régimes : les années 70 et 80, avec une croissance seulement légèrement supérieure à celle de la France ; les années 90 et 00 (enfin, 2000-2007), avec un net différentiel de croissance.
Cette rupture de croissance au début des années 90 s’explique par un changement en profondeur du modèle économique de l’Islande. Avant cette date, la croissance a surtout été tiré par une tertiarisation de l’économie (mouvement général dans le monde) et un secteur primaire (pêche principalement) qui fournissait l’essentiel des exportations et « pesait » plus de 10 % de la valeur ajoutée (VA) produite. Ainsi, la VA en volume (hors inflation) du secteur primaire progressait autour de 4,5 % par an en moyenne et celle des services de 5 % en moyenne. Le secteur industriel, représentant autour de 20 % de la VA en moyenne, connaissait lui des performances plus modestes (+1,8 % en moyenne). Ce modèle de croissance (tertiarisation et appui sur un point fort à l’exportation – secteur de la pêche) n’avait finalement rien d’original.
En revanche, une fois passée la grave crise de la fin des années 80 - début 90 dans les pays scandinaves- qui a aussi touché l’Islande - la croissance a vraiment décollé. En France, on connaît peu cette crise économique, pourtant elle était d’une violence et d’une gravité (pour les pays scandinaves…) encore plus grande que celle que nous connaissons actuellement. La crise a servi de révélateur pour les pays nordiques. Notamment, l’Islande s’est révélée trop dépendante du secteur de la pêche pour ses exportations. Aucun autre secteur n’était suffisamment tourné vers l’extérieur pour aller chercher de la croissance en dehors. Or, sur le plan intérieur, le chômage a commencé à monter (début années 90), les gains de productivité s’essoufflaient, les entreprises n’investissaient… Bref, on se demandait comment faire pour faire redémarrer l’économie.
Pour résumer, le pays était confronté à un problème de croissance à court (répondre à la crise) et moyen-long terme (diversifier l’économie et augmenter le potentiel de croissance).
L’Islande va répondre à ces enjeux en modifiant quasi-radicalement son modèle économique. Comment ? Vous le saurez dans le prochain épisode.
Un indice : le taux de dépenses en R&D passe de 0,7 % du PIB en 1985 à 2,7 % en 2000.
* Mesure prise pour faciliter les comparaisons internationales (parité de pouvoir d’achat = gomme les écarts lié au change et niveau des prix entre pays ; volume = corrigé de l’évolution des prix dans le temps)
Les statistiques citées ici sont issues des bases de données de l’OCDE.
Avant de rentrer en crise dès 2006, en septembre 2008 sous sa forme la plus aigüe, l’Islande a derrière elle un passé glorieux. En effet, en 1970, le produit intérieur brut en volume par habitant islandais et en parité de pouvoir d’achat* était inférieur de 48 % à la moyenne de l’OCDE (pays dits « développés ») et proche de celui de la France (5 % en dessous pour être précis). En 2005, l’Islande dépassait la moyenne de l’OCDE de 39 %... et la France de 27 % !
En clair, cela veut dire que sur 30 ans l’économie islandaise a cru nettement plus rapidement que la plupart des autres pays développés et que ces habitants se sont fortement enrichis. Ce petit pays a d’ailleurs laissé la France loin derrière.
Il serait vain de préciser l’ensemble des éléments qui ont accompagné le rattrapage puis le dépassement de la moyenne de l’OCDE en termes de niveau de vie. Il faudrait pour cela écrire un livre. Toutefois, quelques éléments structurants donnent, je pense, les grandes lignes du chemin emprunté.
Premièrement, pour faire plaisir aux démographes, il n’est de richesse que d’Homme. Un élément de fond, présent de 1970 à aujourd’hui est le dynamisme de la démographie islandaise. La population est en croissance forte, autour de +1,1 % par an en moyenne entre 1970 et 2007 (+0,5 % en France). On note juste un léger tassement au début des années 90. Cette croissance est principalement alimentée par la natalité la plus forte des pays européens. En effet, contrairement à ce qui est souvent dit, la France ne détient pas le record de la fécondité, le vrai détenteur étant L’Islande avec 2,07 enfants par femme en âge de procréer en 2006 (stable autour de ce chiffre depuis le début des années 90), légèrement devant la France (1,98). Depuis de début des années 2000, on a observé une immigration plus importante du fait des besoins en main d’œuvre générés par la situation de plein emploi. De façon très classique, démographie dynamique = croissance dynamique.
Toutefois, la démographie seule ne peut expliquer l’écart de performance avec la France. Une observation plus attentive des taux de croissance montre en fait deux régimes : les années 70 et 80, avec une croissance seulement légèrement supérieure à celle de la France ; les années 90 et 00 (enfin, 2000-2007), avec un net différentiel de croissance.
Cette rupture de croissance au début des années 90 s’explique par un changement en profondeur du modèle économique de l’Islande. Avant cette date, la croissance a surtout été tiré par une tertiarisation de l’économie (mouvement général dans le monde) et un secteur primaire (pêche principalement) qui fournissait l’essentiel des exportations et « pesait » plus de 10 % de la valeur ajoutée (VA) produite. Ainsi, la VA en volume (hors inflation) du secteur primaire progressait autour de 4,5 % par an en moyenne et celle des services de 5 % en moyenne. Le secteur industriel, représentant autour de 20 % de la VA en moyenne, connaissait lui des performances plus modestes (+1,8 % en moyenne). Ce modèle de croissance (tertiarisation et appui sur un point fort à l’exportation – secteur de la pêche) n’avait finalement rien d’original.
En revanche, une fois passée la grave crise de la fin des années 80 - début 90 dans les pays scandinaves- qui a aussi touché l’Islande - la croissance a vraiment décollé. En France, on connaît peu cette crise économique, pourtant elle était d’une violence et d’une gravité (pour les pays scandinaves…) encore plus grande que celle que nous connaissons actuellement. La crise a servi de révélateur pour les pays nordiques. Notamment, l’Islande s’est révélée trop dépendante du secteur de la pêche pour ses exportations. Aucun autre secteur n’était suffisamment tourné vers l’extérieur pour aller chercher de la croissance en dehors. Or, sur le plan intérieur, le chômage a commencé à monter (début années 90), les gains de productivité s’essoufflaient, les entreprises n’investissaient… Bref, on se demandait comment faire pour faire redémarrer l’économie.
Pour résumer, le pays était confronté à un problème de croissance à court (répondre à la crise) et moyen-long terme (diversifier l’économie et augmenter le potentiel de croissance).
L’Islande va répondre à ces enjeux en modifiant quasi-radicalement son modèle économique. Comment ? Vous le saurez dans le prochain épisode.
Un indice : le taux de dépenses en R&D passe de 0,7 % du PIB en 1985 à 2,7 % en 2000.
* Mesure prise pour faciliter les comparaisons internationales (parité de pouvoir d’achat = gomme les écarts lié au change et niveau des prix entre pays ; volume = corrigé de l’évolution des prix dans le temps)